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Chroniques / Jean-Baptiste Noé

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Jean-Baptiste Noé

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Le Japon dans une crise politique inédite
par Jean-Baptiste Noé

Le Japon traverse l’une des crises politiques les plus profondes des dernières décennies. Le parti historique au pouvoir, le PLD, ne dispose plus de majorité mais l’opposition est fracturée. Face aux défis du pays, le risque est celui de l’immobilisme.

18/10/2025 - 08:30 Lecture 5 mn.

Il n’y a pas qu’en France que le gouvernement connaît une crise politique. Mais venant du Japon la situation est d’autant plus surprenante que le pays est habitué à une remarquable stabilité gouvernementale. Depuis 1948, un seul parti dirige le Japon : le PLD, d’où sont issus tous les Premier ministre, sauf très rares exceptions. Ce fut notamment le cas entre 1993 et 1996 et, plus récemment, entre 2010 et 2012. Cinq années de direction de l’opposition pour 77 ans de PLD.

Autant dire que la crise actuelle ébranle bien des certitudes. D’une part parce que le PLD pourrait perdre le pouvoir si ses opposants parviennent à se coaliser. D’autre part, parce que, si le PLD arrive à se maintenir, ce devrait être une femme qui serait Premier ministre, Sanae Takaichi, ce qui serait une grande première. Mais dans une situation bien inconfortable, puisqu’elle devrait gouverner avec deux chambres hostiles. Preuve de cette instabilité, la difficulté à élire le chef du gouvernement. L’élection devait initialement se tenir mercredi 15 octobre, mais, faute d’entente, celle-ci a été décalée au 21 octobre. De quoi laisser un peu de répit au PLD pour négocier avec sa coalition, et surtout éviter une coagulation de son opposition.

 

La question nucléaire

 

L’un des points saillants porte sur la place du nucléaire au Japon.

Le Parti démocrate constitutionnel (PDC), principale formation d’opposition avec 148 élus à la Chambre basse, défend une sortie progressive du nucléaire civil et la restauration d’une doctrine pacifiste. Cette position contraste avec celle de ses potentiels alliés, plus favorables à un renforcement militaire et à une relance partielle du parc nucléaire japonais, qui pèse pour près de 25 % de la production d’électricité. Un abandon auquel est opposé le PLD, mais aussi plusieurs partis qui pourraient former une coalition avec le PDC. De quoi animer les débats pour trouver une entente parlementaire.

Corollaire de la question nucléaire, celle de la démographie. La population japonaise vieillit et diminue. C’est certes le pays avec la plus grande espérance de vie, mais c’est aussi celui avec le plus faible taux de natalité. Si bien qu’après le pic des années 2010, la population ne cesse de décroître. Ce qui n’est pas sans poser de lourds problèmes économiques, ouvrant de nouveaux débats sur l’ouverture à l’immigration pour compenser la perte de Japonais. Une ouverture à laquelle le PDC est favorable, alors que le PLD y est opposé : sa cheffe défend une plus grande fermeté sur le contrôle des frontières et l’entrée des populations étrangères.

 

Face à la Chine

 

Autre question qui agite le Japon, le positionnement à tenir face à la Chine. Entre Tokyo et Pékin, le contentieux historique est lourd. Jusque dans les années 2000, le Japon était encore, économiquement et politiquement, devant la Chine. Depuis, il s’est fait dépasser dans la compétition mondiale, perdant par la même occasion son leadership sur la zone asiatique. Depuis 1945, le Japon est l’allié indéfectible des États-Unis et le rempart face au communisme, l’URSS et la Chine de Mao autrefois, celle de Xi Jinping désormais. La question de Taïwan tourmente les Japonais, qui s’interrogent sur la position à tenir en cas d’invasion de l’île. D’où les débats sur la doctrine pacifiste, position officielle du Japon depuis 1945, qui avait été brisée par Shinzo Abe.

Cette position révisionniste n’est pas du goût de tous les partis, dont beaucoup souhaitent revenir au pacifisme post-guerre mondiale. Telle n’est pas la position de Sanae Takaichi qui, en disciple d’Abe, soutient une politique de défense et de réarmement. Mais avec quelle finance, le pays étant surendetté, et avec quels soldats, le pays manquant de jeunes ? De la doctrine à la réalisation, il y a tout un monde à franchir.

Quoi qu’il arrive, le Premier ministre du 21 octobre sera fragilisé. Le PLD a perdu de nombreuses élections et ne dispose plus de majorité ; pas plus que l’opposition. Difficile donc de gouverner dans ces temps troublés. Sanae Takaichi a Margaret Thatcher comme idole. À elle de démontrer qu’elle peut être une nouvelle Dame de fer.

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