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Chroniques / Jean-Baptiste Noé

Chroniques
Jean-Baptiste Noé

Chronique
Mourir aux combats ?
par Jean-Baptiste Noé

L’intervention du chef d’état-major des Armées au congrès des maires de France a suscité de nombreux commentaires lorsque celui-ci a évoqué la possibilité que des Français meurent au combat. C’était rappeler aux maires qu’aucun territoire n’est épargné par les guerres en cours.

22/11/2025 - 08:30 Lecture 5 mn.

D’une voix monotone et sans emphase, le chef d’état-major des Armées, le général d’armée aérienne Fabien Mandon, a évoqué devant les maires de France les menaces qui pèsent sur le pays et les risques de confrontation avec la Russie. Une phrase, souvent isolée du reste de l’intervention, a suscité un certain émoi quand il a évoqué la possibilité que des Français meurent au combat : "Il faut accepter de perdre nos enfants, de souffrir économiquement.". Certains y ont vu l’annonce d’un engagement futur de l’armée française en Ukraine, ce qui n’était pas l’objet du CEMA.

 

Force d’âme

 

Le sujet de l’intervention portait bien sur la "force d’âme", un thème régulièrement évoqué dans les publications et les interventions des armées, notamment l’armée de Terre. C’est-à-dire la capacité à s’unir pour un projet plus grand et à effectuer un effort qui puisse aller jusqu’au sacrifice de sa vie : "Ce qu’il nous manque, c’est la force d’âme pour accepter de nous faire mal pour défendre la nation".

Le lieu de l’intervention, le salon des maires de France, n’est pas neutre et dit beaucoup plus que les propos tenus. Le 11 novembre, dans toutes les communes de France, les maires et leur conseil municipal ont défilé devant le monument aux morts pour commémorer l’armistice de 1918. Que le CEMA intervienne le 19 novembre pour rappeler que la guerre n’est pas qu’un fait historique, mais qu’elle se déroule encore aujourd’hui est une façon utile d’actualiser des commémorations qui tournent souvent à vide.

C’est aussi rappeler que les communes de France sont directement impliquées dans les guerres, notamment celles qui accueillent des régiments sur leur sol. Castres, Saumur, Bayonne, Besançon, pour ne citer que quelques exemples, auraient des géographies économiques et urbaines bien différentes si les régiments n’étaient plus présents. Qu’un mort survienne lors d’une opération et c’est l’ensemble de la ville qui est touché tant l’imbrication est forte entre le régiment et l’espace urbain.

Mais si les regards sont tournés vers l’Ukraine, c’est bien sur le territoire national que meurent aujourd’hui les militaires, notamment en Guyane et en Nouvelle-Calédonie. Au cours des dernières années, ce sont les gendarmes qui ont payé la plus lourde contribution. Bien que rattachée au ministère de l’Intérieur, la gendarmerie demeure une structure militaire dont la présence sur le territoire métropolitain et dans l’outre-mer est indispensable à l’organisation des communes. Ce dont beaucoup de maires n’ont pas toujours pris conscience.

 

La guerre en France

 

La culture stratégique et militaire des maires est souvent faible, voire inexistante. Or, les mairies sont aux premières lignes des combats internationaux et sont souvent le dernier maillon des chaînes géopolitiques mondiales.

Le trafic de drogue, par exemple, qui déstructure le corps social et qui détruit un grand nombre de quartiers, ne peut se comprendre et se traiter sans une vision globale, avec des routes de la drogue qui passent par le golfe de Guinée, l’océan Atlantique, les ports de la mer du Nord. Il en va de même pour les trafics, qu’ils s’agissent de migrants, d’armes, d’œuvres d’art, ainsi que pour la criminalité internationale, par exemple pour le vol de cuivre et le trafic des déchets.

Trop préoccupés par leurs soucis du quotidien, les problèmes de voiries, de voisinage et de centre-ville, les maires ont souvent du mal à penser la géopolitique globale, jusqu’au moment où leurs communes sont attaquées. Les attaques cyber qui touchent régulièrement les services communaux, mettant hors service les structures de restauration, d’école, d’hôpitaux, engendrent des prises de conscience trop tardives, dont les conséquences humaines et financières sont souvent très lourdes.

En janvier 2021, la ville de Houilles (Yvelines, 33 000 habitants) était ainsi victime d’une cyberattaque qui lui a coûté plus de 600 000 euros de dégâts et de réparation et qui a mis à genoux ses services communaux. En 2024, c’est l’hôpital de Cannes et la ville et l’agglomération de Saint-Nazaire qui ont été attaquées par des attaques cyber. Depuis 2020, les exemples sont nombreux de communes et de collectivités locales attaquées. Or, cela est souvent le fait de réseaux internationaux et s’inscrit dans une criminalité transfrontalière. Le CEMA a donc raison d’intervenir devant les maires pour leur rappeler leurs responsabilités, la première étant de prendre conscience que les communes et les mairies sont bien aux premières loges des tourments du monde.

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