Chroniques / Jean-Baptiste Noé
Chroniques
Jean-Baptiste Noé
Chronique
Innovation : une nécessité pour l’armée de Terre
par Jean-Baptiste Noé
L’innovation est indispensable pour le maintien d’un appareil militaire en état d’intervention. L’armée de Terre encourage l’innovation en interne et s’appuie aussi sur un très dense tissu de PME françaises.
Le camp de Sissonne, dans l’Aisne, est connu des militaires pour son centre d’entraînement au combat urbain. Sur plusieurs hectares sont reproduits des pavillons, des immeubles, des centres-villes pour permettre aux soldats de s’entraîner dans le contexte si particulier de la guerre urbaine. Les 9 et 10 juillet derniers, c’est un autre exercice qui était déployé sur le camp, celui des rencontres de l’innovation entre l’armée de Terre et des PME. Le salon TechTerre, organisé par le Commandement du combat futur, visait à permettre les échanges et les interactions entre les concepteurs et les utilisateurs, c’est-à-dire les soldats, afin d’anticiper et de préparer les méthodes de combat de demain. Au cœur de ce salon, la technologie bien sûr, mais surtout l’innovation. Preuve de la grande importance que l’armée y apporte, le chef d’état-major de l’armée de Terre était présent le 10 juillet, notamment pour assister à des démonstrations.
L’innovation par tous les moyens
L’innovation peut émaner des industriels comme des soldats eux-mêmes. L’armée a toujours été un lieu d’innovation où le bricolage et la débrouille sont de mises pour s’adapter aux conditions et affronter l’ennemi. Des innovations pensées par des soldats et conçues pour la guerre qui peuvent ensuite se retrouver dans le domaine civil. Radar, avion, sonar, textiles techniques, on ne compte plus que les inventions majeures qui ont été créées ou développées par le monde militaire avant de servir l’économie de paix. Mais l’innovation, cela peut être aussi des petites choses qui sont grandement utiles au combat. Par exemple des semelles de chaussures plus ergonomiques, des sacs à dos où le poids est mieux réparti, des textiles plus légers, plus résistants, plus adaptés à la chaleur. Autant de choses qui améliorent la condition du soldat et lui permettent d’être plus efficace sur le champ de bataille. La guerre ne se gagne pas qu’avec des Rafales et des Griffons, même si leur visibilité est grande, elle se joue aussi avec des équipements fiables et adaptés.
Un des mérites du TechTerre était d’avoir invité des PME et non pas les grands groupes industriels habituels. Dans l’un des hangars de Sissonne, c’est ainsi un concentré de réflexions et d’intelligence qui émane d’entreprises parfois assez petites et qui témoignent de la vitalité du tissu industriel français. Des entreprises souvent situées en province, loin des métropoles, et qui derrière elles tirent tout un territoire en apportant emplois et financements et en mobilisant d’autres entreprises qui travaillent dans leur sillon. Ce dynamisme du tissu entrepreneurial français du domaine de la défense témoigne de la capacité d’une économie à former les ingénieurs et les commerciaux nécessaires, qui valorise les inventions et l’adaptation aux nouveaux besoins.
Virtuel et réel
L’un des axes d’innovation est celui du virtuel et de l’intelligence artificielle. Conception de casques virtuels pour apprendre à piloter des drones, simulateur d’opérations de sécurité, logiciels qui permettent de créer des ordres de mission et de les modifier, sont autant d’innovations qui permettent de faciliter les entraînements du combattant et donc d’être plus performant en opération.
Un autre sujet traité par de nombreuses entreprises est celui des postes de commandement, qui sont devenus une cible régulière en Ukraine. Détruire un poste de commandement, c’est empêcher la transmission des ordres et donc couper la manœuvre de l’armée. Pour limiter ces attaques sont développés des systèmes qui permettent de déployer et de ranger plus rapidement les postes, en effectuant quelques branchements essentiels et en optimisant la gestion des espaces, ainsi que le développement d’abris modulables, qui permettent d’installer les postes très rapidement dans des caves, des pièces de maisons détruites, des forêts.
Là aussi, cela semble basique, très éloigné des projets de grands matériels dont les coûts peuvent s’élever à plusieurs millions d’euros, mais essentiel pour mener des opérations. C’est en effet l’un des grands enseignements de la guerre en Ukraine et à Gaza : pour vaincre, une armée doit disposer d’une maîtrise de la haute technologie mais aussi des objets du quotidien du soldat et de toutes les opérations et transmissions essentielles à la conduite de la guerre. Ce qui passe par la recherche constante de l’innovation.
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