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Chroniques / Jean-Baptiste Noé

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Jean-Baptiste Noé

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Taïwan : le combat des hautes eaux
par Jean-Baptiste Noé

Dans la guerre à bas bruit contre Taïwan, le contrôle de la mer est un enjeu de première nécessité. Contrôle de la mer de Chine, mais aussi contrôle du Pacifique. Et dans la mer, la question des fonds sous-marins est essentielle, ce qui nécessite la maîtrise des sous-marins.

17/12/2022 - 08:30 Lecture 4 mn.

 

Pour comprendre la tension entre la Chine et Taïwan et le conflit à bas bruit que se livrent les deux pays, plusieurs clefs de lecture sont possibles. Clef idéologique, avec la volonté pour Pékin de réunir la Chine, clef économique, avec le bras de fer pour contrôler les semi-conducteurs, mais aussi clef maritime. Que Taïwan soit une île renforce bien évidemment l’intérêt maritime de la zone, mais ce n’est pas la seule raison. L’autre, fondamentale elle aussi, est le contrôle des axes de passage et notamment ceux qui conduisent vers le Pacifique.

 

Hautes eaux ou basses eaux ?

 

Jusqu’à présent, le partage des souverainetés est assez clair. À la Chine le contrôle des basses eaux, celles qui entrent dans ses eaux territoriales ou dans sa ZEE (zone économique exclusive), aux États-Unis le contrôle des hautes eaux, celles qui donnent accès au Pacifique.

Une grande partie de la profondeur de cette mer oscille à quelques dizaines de mètres. La profondeur du détroit de Malacca, qui en est l’une des principales portes, est de 200 mètres. Une mer qui est donc assez peu profonde, en dépit de sa grande superficie. Ce qui signifie qu’elle est aisément mise sous surveillance par des bâtiments de surface. Les Philippines, Taïwan, la Malaisie forment la limite de la mer basse ; on quitte alors le talus continental pour entrer dans la plaine abyssale. C’est là le domaine des hautes eaux, dont la profondeur passe sous la barre des 4 000 mètres. Des eaux difficilement contrôlables, à l’espace vaste, qui sont le royaume des sous-marins.

Si la Chine contrôle les basses eaux de sa mer, avec des occupations régulières d’îlots via des bateaux de pêche, elle ne dispose nullement du contrôle des hautes eaux, mainmise des États-Unis. L’un des enjeux du contrôle de Taïwan est de posséder un accès à ces eaux de grande profondeur, c'est-à-dire un accès au Pacifique, aujourd'hui monopole américain. Ce qui suppose la possession et la maîtrise de sous-marins. Les États-Unis ont établi une sorte de frontière fortifiée maritime en bordant la présence chinoise et en empêchant que celle-ci ne déborde sur l’espace Pacifique, jugé essentiel pour la sécurité américaine. Un containment maritime qui ne dit pas son nom mais qui est explicite au regard de la politique américaine.

 

Le sous-marin, un outil essentiel

 

Dans cet affrontement pour le contrôle des profondeurs, le sous-marin est l’outil roi. Silencieux, presque invisible, disposant d’une large autonomie, pouvant surgir là où l’adversaire ne l’attend pas, il est l’arme indispensable pour le contrôle de ce vaste espace des fonds maritimes. Ici, les États-Unis disposent encore d’un avantage technologique majeur par rapport à la Chine. La France ne manque pas d’atouts non plus, notamment grâce aux qualités technologiques de NavalGroup. La nécessité du sous-marin et son rôle premier comme clef de compréhension des tensions taïwanaise permet de replacer sous un autre angle le drame de la rupture du contrat australien.

Imbibés de pensées américaines, les Australiens ont compris la nécessité de contrôler les fonds sous-marins et donc, conséquemment, de disposer de sous-marins. D’où le contrat initialement conclu avec NavalGroup, puis rompu quand ils ont estimé que la maîtrise des fonds sous-marins serait mieux garantie par le partenariat Aukus, ce qui passe par l’achat de sous-marins américains. Un choc pour la France, mais une démarche qui a sa logique quand on comprend la nécessité de la maîtrise des abysses. Les Américains n’ont pas proposé uniquement des sous-marins, ils ont vendu une intégration dans une stratégie globale et un usage des sous-marins dans une alliance de protection. Un paquet global que seule la première puissance mondiale est capable d’offrir à ses alliés. Invisible et silencieux, le sous-marin n’en demeure pas moins un élément clef de l’affrontement entre Pékin et Washington.

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