BNP Paribas relève la barre prudentielle / Nouvelle cible de capital et rachat d’actions en renfort

Alors que le débat autour du dossier soudanais a pu venir brouiller ces dernières semaines la perception du groupe auprès des investisseurs, BNP Paribas vient de remettre sa trajectoire de capital au centre du jeu. En relevant à 13 % son objectif de ratio CET1 à horizon 2027, la banque reprend la main sur un sujet qui concentre aujourd’hui l’attention. " C’est précisément ce que le marché voulait entendre", relève UBS, qui voit dans cette mise à jour un signal clair adressé aux investisseurs.

Le nouvel objectif s’appuie sur trois leviers identifiés : une profitabilité en progression, une croissance modérée des actifs pondérés d’environ 2 % par an, et une accélération des cessions d’actifs non stratégiques. Sur le premier levier, celui de la rentabilité, BNP Paribas vise en effet un ROTE de 13 % en 2028, c’est-à-dire le rendement des fonds propres tangibles, un indicateur clé de la capacité du groupe à générer durablement du capital. Cette cible représente une amélioration de 210 points de base par rapport à 2024. Les deux tiers de cette progression proviendront des plans stratégiques déjà engagés dans BCEF, Personal Finance, BCEB et l’Asset Management, le solde étant porté par les autres métiers dans un cadre d’efficacité opérationnelle renforcée. "Les mesures annoncées aujourd’hui s’inscrivent dans la continuité de notre stratégie et préparent le plan 2027-2030", observe ainsi Jean-Laurent Bonnafé, l’administrateur directeur général du groupe.

La maîtrise des actifs pondérés

Au cœur de cette trajectoire se trouve également la maîtrise des actifs pondérés par les risques, ou RWA, qui constituent la base de calcul des ratios de solvabilité. La banque prévoit une progression contenue d’environ 2 % par an, une discipline explicitement saluée par les analystes d’UBS. "Ces annonces correspondent à ce que le marché disait vouloir : un engagement à maintenir une croissance faible des RWA ", écrit vendredi la banque suisse.

UBS souligne par ailleurs "une plus grande flexibilité dans la gestion du portefeuille d’activités, inversant ainsi, dans une certaine mesure, ce qui apparaissait de l’extérieur comme une priorité donnée à la taille plutôt qu’à la rentabilité des capitaux propres dans la stratégie du groupe".

Un objectif CET1 ajusté aux futures contraintes réglementaires

À fin septembre, le ratio CET1 phasé ressortait à 12,5 %. Fixer une cible à 13 % post-FRTB permet désormais d’intégrer explicitement l’impact du futur cadre de révision du risque de marché dans Bâle III. La mise en œuvre de FRTB, plusieurs fois repoussée en Europe afin de préserver l’équilibre concurrentiel vis-à-vis des États-Unis et du Royaume-Uni, devrait peser de l’ordre de 30 points de base sur les ratios. En incorporant cet effet dès aujourd’hui, BNP Paribas renforce la lisibilité de sa trajectoire prudentielle et de ses marges de manœuvre.

Cette clarification intervient alors que certains investisseurs ont cherché à apprécier la sensibilité du capital aux risques potentiels liés au dossier soudanais. Dans une note publiée récemment, Deutsche Bank rappelait qu’un milliard d’euros d’amende éventuelle réduirait mécaniquement le CET1 d’environ 13 points de base. Si l’issue du dossier reste incertaine et que la banque conteste fermement les accusations, cet ordre de grandeur a contribué à focaliser l’attention sur la marge de manœuvre prudentielle.

Vers une gestion plus active de l’excédent de capital

Autre signal fort, BNP Paribas lancera en novembre un programme de rachat d’actions de 1,15 milliard d’euros, autorisé par la BCE et positionné comme une anticipation de la distribution du résultat 2025. Plus largement, " le groupe ouvre la voie à une gestion plus dynamique de son excédent de capital à terme, en retournant chaque année une part de son excédent de capital au-delà d’un CET1 de 13 % aux actionnaires ", observe de son côté le cabinet Oddo BHF. La banque précise que ce surplus sera réévalué chaque fin d’année, afin d’adapter le niveau de distribution à la trajectoire prudentielle du groupe.

Le signal adressé jeudi aux investisseurs s’inscrit d’ailleurs dans une trajectoire stratégique très bien cadrée, grâce à deux rendez-vous clairement identifiés. BNP Paribas détaillera ses perspectives de croissance et de rentabilité à horizon 2028 lors de la publication des résultats annuels 2025, qui seront présentés au début de l’année prochaine, puis dévoilera début 2027 son plan stratégique 2027-2030.