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Worldline met le cap sur sa nouvelle étoile polaire / Le plan North Star 2030 trace la voie d’un retour à la croissance en 2027
Worldline a levé le voile sur son plan North Star 2030, vaste feuille de route destinée à restaurer sa croissance et sa génération de trésorerie. Présenté un an après l’arrivée de Pierre-Antoine Vacheron, ce projet marque une rupture assumée : recentrage sur les paiements, rationalisation des plateformes et retour annoncé à un modèle intégré et souverain.
L’événement était attendu de longue date. Huit mois après sa prise de fonctions, Pierre-Antoine Vacheron présentait jeudi la nouvelle feuille de route de Worldline devant la communauté financière. Sur le plan boursier, la séance fut rude : le titre a décroché de près de 10 %. Un mouvement toutefois mesuré au regard de l’annonce surprise d’une augmentation de capital de 500 millions d’euros, soit un montant "proche de la capitalisation boursière actuelle", relevait Oddo BHF, pour qui cette opération reste "le point négatif du Capital Markets Day". Destinée à ramener le levier financier sous deux fois l’EBITDA d’ici fin 2026, l’opération sera partiellement réservée aux actionnaires de référence – Bpifrance, Crédit Agricole et BNP Paribas – avant une souscription ouverte à l’ensemble du capital.
"Cette levée de fonds nous donne, à nous comme à nos investisseurs, la sérénité nécessaire pour entrer dans cette transformation", a expliqué Pierre-Antoine Vacheron devant les investisseurs réunis à Paris La Défense, dans les locaux du groupe situés à la Tour Voltaire. Le directeur général y voit un préalable indispensable pour mener la mutation qu’il appelle de ses vœux : recentrer Worldline sur son cœur de métier, les paiements, et en faire le partenaire de référence des commerçants et des institutions financières européennes. "Notre vocation est claire : être le partenaire de confiance des paiements en Europe", a-t-il résumé, soulignant la volonté de bâtir un groupe plus intégré, plus automatisé et souverain sur le plan technologique.
Un recentrage déjà bien avancé. "En quatre mois, nous avons signé trois cessions : Mobility & e-Transactional Services, nos opérations nord-américaines et Cetrel Securities au Luxembourg. Cela prouve notre discipline d’exécution", a rappelé le dirigeant. Ces ventes, pour un produit global estimé entre 350 et 400 millions d’euros, visent à simplifier le périmètre et à concentrer les ressources sur l’Europe, où Worldline revendique désormais 1,2 million de marchands, 23 000 agences bancaires partenaires et 20 % des cartes de paiement en circulation.
Un plan de transformation séquencé
C’est dans ce contexte que le directeur général a dévoilé le plan North Star 2030, colonne vertébrale du redressement du groupe. Ce programme de transformation, conçu comme une trajectoire progressive, repose sur quatre axes – Simplify, Converge, Integrate, Grow – qui s’enchaîneront jusqu’en 2030. "Le plan est conçu pour avancer par étapes, en fonction de ce que l’organisation peut absorber et de ce que les clients peuvent accepter", a expliqué Pierre-Antoine Vacheron.
Simplify vise à simplifier la structure du groupe et ses fonctions support (RH, finance, IT), à alléger l’organisation commerciale pour un ciblage plus fin par segments et pays, et à améliorer la productivité technologique – objectif : +20 % d’ici 2029. "Nous avons commencé à rendre nos organisations plus lisibles, plus directes, et à réduire la superposition des niveaux", a-t-il précisé.
Converge repose sur une réduction drastique du nombre de plateformes – de cinquante aujourd’hui à dix-sept dans cinq ans – afin de les rendre plus performantes et homogènes. Le groupe entend migrer vers des infrastructures cloud modernes, harmoniser ses standards de sécurité et de conformité, et exploiter l’IA générative pour automatiser le traitement des données. "Nos plateformes cibles sont déjà en place, elles sont à l’état de l’art. Le problème n’est pas la technologie, mais la convergence", a insisté le dirigeant.
Integrate concerne l’unification des opérations au sein des Global Competence Centers de Worldline, situés en Inde, Pologne et Roumanie, qui passeront de 16 % à près de 30 % des effectifs d’ici 2030. Ces pôles joueront un rôle central dans la diffusion des innovations en IA, cybersécurité et automatisation. "Nous avons déjà la culture et les outils pour faire de ces centres des hubs d’excellence", a-t-il assuré.
Enfin, Grow doit permettre de restaurer la performance commerciale. Le groupe simplifiera son portefeuille de produits pour le rendre "easy to buy, easy to use", renforcera la relation client grâce à l’intelligence artificielle et optimisera la gestion des revenus. "Nous avons identifié un potentiel important de productivité commerciale ; l’amélioration du revenue management commence à porter ses fruits", a expliqué Pierre-Antoine Vacheron, évoquant la remontée progressive des marges sur le pôle Merchant Services.
Une trajectoire financière graduelle
Le groupe assume une phase de transition en 2026 – une année de "reset" et de consolidation – avant un retour à la croissance à partir de 2027. L’objectif : atteindre 4 % de croissance annuelle moyenne sur 2027-2030, pour un EBITDA d’environ 1 milliard d’euros et un flux de trésorerie disponible de 300 à 350 millions. "Le plan deviendra générateur de trésorerie dès 2027, lorsque les économies réalisées compenseront pleinement les investissements engagés", a-t-il promis.
Sur un plan opérationnel, 80 % des revenus proviendront des services aux commerçants, 20 % des services financiers, et 90 % de l’activité sera concentrée en Europe. Le groupe finalise la sortie de ses activités non stratégiques (METS, Amérique du Nord, Cetrel), représentant quelque 500 millions d’euros de chiffre d’affaires cédé. La priorité sera désormais double : reconquérir les institutions financières à partir de 2027 et relancer la croissance auprès des PME et grands comptes grâce à des solutions unifiées – terminaux Android, Tap on Mobile, Launchpad AI.
L’innovation reste au cœur du dispositif. "Nous serons parmi les premiers acteurs européens à déployer le commerce agentique avec de vrais marchands", a-t-il indiqué, citant un projet pilote avec Google. "Notre force, c’est la capacité à collaborer : nous ne faisons pas tout seuls, nous travaillons avec des partenaires qui apportent leur technologie."
Dans un secteur où la confiance et la souveraineté technologique deviennent des enjeux clés, Pierre-Antoine Vacheron a défendu une vision pragmatique : "L’Europe est notre marché et nous y sommes européens." Une façon de rappeler que la transformation engagée vise autant à corriger le passé qu’à repositionner Worldline comme un acteur incontournable de l’écosystème des paiements du Vieux Continent.
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