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Chroniques / Jean-Baptiste Noé

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Jean-Baptiste Noé

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Huawei est de retour
par Jean-Baptiste Noé

Stupeur aux États-Unis : malgré les sanctions, Huawei a sorti un nouveau smartphone. En dépit des sanctions américaines, l’entreprise a pu s’approvisionner en microconducteurs et en matériaux techniques. Sa sortie ébranle les convictions américaines et démontre le poids majeur des symboles dans la géopolitique mondiale. 

16/09/2023 - 08:30 Lecture 4 mn.

Par les symboles qu’ils représentent et les révolutions techniques qu’ils opèrent, certains objets bouleversent le monde. La pellicule photographique de Kodak ou l’i phone d’Apple furent de ceux-là. En sortant, à la surprise générale, son nouveau smartphone, le Mate 60 Pro, Huawei pourrait aussi être de ceux-là.

En apparence, il n’y a rien d’extraordinaire : il s’agit d’un smartphone comme beaucoup savent en faire. Mais ce sont les conditions de sa sortie et ses évolutions techniques qui, d’ores et déjà, bouleversent l’ordre établi.

 

Dans la guerre économique

 

Huawei fut l’épicentre de la guerre économique que les États-Unis et la Chine se mènent. Par crainte de la captation des données et de l’avancée de l’entreprise chinoise, Donald Trump décida en 2020 de sanctions économiques qui devaient mettre la firme à genoux, privée qu’elle était de matériaux et de composants indispensables à la fabrication de ses téléphones. Ses smartphones disparurent des magasins et beaucoup pensaient, y compris à la direction du groupe, que l’entreprise devait s’orienter vers d’autres secteurs. Il était convenu que l’on ne devait plus entendre parler de Huawei. Jusqu’au coup de tonnerre dans un ciel bleu. Sans publicité, sans campagne marketing, Huawei sortit début septembre son smartphone dernière génération dans un seul magasin chinois, à Shenzhen. Une discrétion qui prit le monde de court et dont l’onde de choc traversa le Pacifique. La demande pour ce dernier appareil est telle que Huawei devrait en vendre 7 millions d’exemplaires, peut-être plus.

Mais là n’est pas le véritable sujet. La seule question qui taraude tous les observateurs est de comprendre comment Huawei a fait pour produire cet appareil. Comment a-t-elle pu se fournir en puce et en semi-conducteur tout en étant soumise aux sanctions américaines ? Comment a-t-elle pu s’approvisionner sur le marché mondial ou pire encore, produire sur le territoire chinois ? On pensait jusqu’à présent que la Chine serait incapable de produire des semi-conducteurs et voilà que ce Mate 60 Pro est peut-être en train de démontrer l’inverser. Loin d’étouffer Pékin, les sanctions auraient pu permettre au nouvel Empire du Milieu de maîtriser des technologies indispensables. Grosse frayeur dans les états-majors américains.

 

La vacuité des sanctions

 

Démonté, l’appareil a livré une partie de ses secrets. Sa puce est identifiée comme étant produite par Semiconductor Manufacturing International Corp (SMIC), l’une des principales fonderies chinoises. Compatible avec la 6G, il pourrait même se connecter par satellite, en utilisant ceux que la Chine a mis dans l’espace. On croyait la Chine à genoux, elle s’est spectaculairement redressée. La stupeur passée, les observateurs observent la suite de la mise en vente du Mate 60 Pro. Son achat en Chine est aussi une question de fierté nationale et de nationalisme ; un moyen de montrer sa puissance face aux États-Unis.

La Corée a Samsung, les États-Unis ont Apple et la Chine Huawei. Dans le combat technologique d’aujourd’hui, le smartphone est tout autant un objet de communication qu’un symbole d’indépendance et de grandeur sur la scène mondiale. Une arme psychologique et culturelle que la Chine a dégainée en cette rentrée 2023 pour rappeler qu’il faudra plus que jamais compter avec elle. En géopolitique, les symboles sont essentiels. Autrefois, on envoyait un Spoutnik dans l’espace, aujourd’hui on dispose un smartphone dans un magasin de Shenzhen.

Avec ce smartphone, la Chine a pris date pour le futur. Elle démontre que son outil industriel est opérationnel, en dépit des sanctions américaines, et qu’elle continue de faire jeu égal avec son concurrent. Un avertissement pour l’Amérique et pour l’Asie, et une grosse frayeur pour Taïwan.

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